Aujourd’hui l’autonomie et l’épanouissement individuels sont devenus des références centrales. Dans le même temps, les institutions traditionnelles, telles que les Églises ou la famille, se sont érodées. L’État et les partis politiques, l’école et l’université, l’armée et la police… connaissent d’importantes transformations. Il importe de prendre la mesure de ces évolutions en dehors des deux optiques qui marquent notre présent : la fuite en avant moderniste ou le retour nostalgique et crispé sur la tradition.
L’avénement de la démocratie est allé de pair avec celui de l’individu qui se détache des anciens modes de filiation et d’appartenance communautaire. Dans les sociétés modernes, le développement de la consommation et des loisirs, la mise en place de garanties et de protections sociales ont accompagné l’aspiration au bonheur individuel.
Ces évolutions ont entraîné un nouveau rapport aux institutions où les notions de besoins et de droits sont devenus prédominantes. Plus récemment, la crise de l’engagement et du militantisme dans les années soixante-dix s’est accompagnée du développement d’un nouvel individualisme qui rend plus problématique le rapport aux institutions et au vivre-ensemble.
- Quelles sont les origines de l’individualisme moderne ? Peut-on considérer qu’une nouvelle étape historique a été franchie dans son développement ?
- Quel est le rôle des institutions dans la construction des identités individuelles et collectives ? Qu’en est-il aujourd’hui ?
- A quelles conditions un renouveau de l’engagement individuel et collectif est-il possible ?
Telles sont les principales questions que ce séminaire se propose d’éclairer par une série d’exposés suivis de débats. Plutôt que de faire appel à une multitude d’intervenants, nous nous en sommes tenus volontairement à un nombre limité d’interventions et de séances, en veillant à la qualité des contenus et en laissant une place au débat.
Programme-Séances
- « Les origines philosophiques de l’individualisme démocratique. » Des auteurs tels que Jean-Jacques Rousseau, Alexis de Tocqueville et Benjamin Constant ont souligné, chacun à leur manière, l’importance prise par l’individu dans les sociétés de l’âge démocratique. Quelles sont leurs conceptions ? En quoi permettent-elles d’éclairer les différentes positions adoptées à l’égard de l’individu aujourd’hui ? Par Jean-Michel Besnier, professeur de philososphie à l’Université technologique de Compiègne, auteur de Histoire de la philosophie moderne et contemporaine, édit. Grasset, Tocqueville et la démocratie, égalité et liberté, édit. Hatier.
- « Nature de l’individualisme contemporain. » Quels sont les principaux changements historiques qui ont amené une nouvelle figure de l’individu ? Comment caractériser le “nouvel âge démocratique” ? Quels sont ses effets dans le rapport aux institutions ? Par Marcel Gauchet, philosophe, auteur de Essai de psychologie contemporaine, Le Débat, n°100 et n°101., La religion dans la démocratie. Parcours de la laïcité, édit. Gallimard.
- « Difficultés de la fonction répressive dans les sociétés démocratiques : l’exemple de Mai 68. » Mai 68 marque un moment historique où la répression n’a pas débouché sur un bain de sang. Quelles leçons peuvent en être tirées du point de vue du maintien de l’ordre dans une société développée ? Avec l’importance accordée aux libertés individuelles et le nouvel individualisme contemporain, comment peut être assumée la fonction répressive nécessaire à l’ordre social ? Sous quelle forme ? Par Maurice Grimaud, ancien Préfet de police de Paris en Mai 68, auteur de En mai, fais ce qu’il te plaît, édit. Stock.
- « Peut-on réconcilier individualisme moderne, respect des institutions et engagement ? A quelles conditions et sous quelles modalités nouvelles ? » Sur la base des principales idées développées dans les séances précédentes, nous nous interrogerons sur les conditions possibles ou non d’un renouveau de l’engagement qui prenne en compte l’individualisme contemporain et les nouveaux défis qu’il pose aux sociétés démocratiques développées. Jean Conilh, philosophe, et Jean-Pierre Le Goff, sociologue, ouvriront le débat.