« Il n’y a plus de censure. Les censeurs l’ont remplacée. Il s’y sont substitués. Et ils sont partout. Mais il faut encore et toujours qu’ils dénoncent ce qu’ils ont supplanté de manière à ce que personne ne puisse jamais se rendre compte avec netteté de l’extension de leurs exactions. 
Derrière le paravent commode d’un “ordre moral ” qui n’existe plus, d’une “hypocrisie puritaine” dont ne survit plus nulle part le moindre échantillon, ou d’une oppression “patriarcale ” à laquelle a succédé depuis déjà longtemps la nouvelle souveraineté féminine, les censeurs se sont multipliés ; mais comme ils ne surveillent, terrorisent, répriment, condamnent et réduisent au silence qu’en parlant une novlangue de rébellion, et en usant d’un lexique de revendication, ils ne peuvent que très difficilement être repérés et définis pour ce qu’ils sont. 
Aux procédés blâmables de l’ancienne censure, ils ont ajouté un appel aussi ostensible que systématique et fallacieux à la liberté qui les rend intouchables en même temps qu’il assure leur hégémonie. » Philippe MURAY, Exorcismes spirituels III, Les Belles Lettres 2002, p. 233.