« Les militants qui militent avant de se demander quel est le contenu même de la réalité qu’ils attaquent ou qu’ils veulent changer témoignent de leur croyance touchante dans un monde qui serait éternel et dans une humanité qui, grosso modo, n’aurait jamais subi de modification fondamentale. Ils mettent la charrue de l’activisme-réflexe avant les bœufs de l’analyse. Ils supposent connu quelque chose qui n’a même pas encore de nom. La “bagarre idéologique » comme vous dites, implique que l’on sait qui est l’adversaire. Mon hypothèse est tout à fait inverse. Elle part de l’idée que nous nous trouvons aujourd’hui, et à peu près dans tous les domaines, dans l’inconnu le plus total. Le mode de production festiviste façonne à vive allure une nouvelle humanité. Le monde humain dans lequel je vis à l’instant n’a rien à voir, mais absolument rien, avec celui dans lequel je suis né. La plupart de ses attitudes relèvent de l’inédit le plus fascinant. Elles auraient été impossibles il ya quinze ans, et encore davantage il y a cinquante ans. » Philippe MURAY, Exorcismes spirituels III, Les Belles Lettres 2002, p. 167.