Séminaire 2015
« La querelle de l’art contemporain : quel état de la modernité ? »

Les trois séances ont lieu le samedi de 14h30 à 17h30.
Dates à retenir : samedi 24 janvier ; samedi 14 février ; samedi 7 mars

L’art contemporain n’en finit pas de provoquer le scandale et la controverse, comme l’affaire du « plug anal » de Paul McCarthy l’a montré récemment. Ceux qui critiquent l’art contemporain peuvent être facilement traités de réactionnaires, défendant une conception de l’art dépassée et soupçonnés de vouloir revenir à une « définition officielle de l’art dégénéré », selon les propres mots de la ministre de la culture. Par delà ces polémiques et ces caricatures, il importe d’abord de savoir ce que signifie « art contemporain », quelle est sa spécificité, quelle est son origine.

Le moins que l’on puisse dire de ce qu’il est convenu d’appeler « la querelle de l’art contemporain », c’est qu’elle ne date pas d’aujourd’hui, ni même d’hier. L’essai qu’a publié sous ce titre Marc Jimenez (Gallimard, 2005), connu pour ses travaux sur la théorie esthétique, et Adorno en particulier, s’inscrit dans une série déjà fort longue de publications dont les auteurs les plus en vue s’appellent Jean Clair, Philippe Dagen, Jean-Louis Harouel, Nathalie Heinich, Anne Martin-Fugier, Yves Michaud, Christine Sourgins, parmi d’autres.

Mais de quand date au juste cette querelle ? De l’hilarité suscitée par les quatre- vingt-dix boîtes de « Merde d’artiste » de trente grammes chacune, vendues en 1961 par l’artiste italien Piero Manzoni au prix de trente grammes d’or ? De la polémique déclenchée par les colonnes de Buren installées au Palais Royal en 1986 ? Ou du scandale provoqué par la Fontaine de Marcel Duchamp, cet urinoir industriel signé « R. Mutt 1917 » qu’avait refusé la Société des artistes indépendants de New York en 1917 et dont il ne reste que des répliques des années 1960 ?

La question est évidemment celle de la date de naissance d’un art contemporain qu’il convient de distinguer de l’art moderne qui, lui-même, se démarque de l’art classique ou romantique…, à moins d’ériger l’art « contemporain » en paradigme, en genre hors du temps. De rupture en rupture et de polémique en polémique, on en arrive sinon au Salon des Refusés de 1863 (Manet, Le déjeuner sur l’herbe), du moins à ce XIXe siècle qui s’est pour la première fois posé la question non seulement des fins de l’art, mais de sa fin. En effet, comment définir une frontière entre l’art et ce qui ne l’est pas lorsque les critères de définition sont devenus tout relatifs.

À travers cette réflexion sur l’art contemporain, Politique Autrement entend poursuivre la réflexion qu’il mène depuis des années sur les évolutions problématiques des sociétés démocratique et les phénomènes qui les caractérisent.

Afin de mieux cerner la question de l’art contemporain, nous envisagerons trois étapes : 

  1. celle de la fin annoncée par Tocqueville d’un certain art ou de l’incompatibilité, sous-entendue par Baudelaire, de l’art et de la démocratie ; 
  2. celle de la rupture radicale avec l’art traditionnel (régi par la mimesis et la perspective), voire du rejet de l’art (la peinture comme intoxication à la térébenthine) à la veille de la Première Guerre mondiale (Picasso, Duchamp) ; 
  3. celle des années 1960/1980 et du remplacement définitif de l’œuvre d’art par le geste de l’artiste (l’époque des « performances »).

Séances

Le séminaire est animé par Robert Kopp, écrivain et éditeur suisse, ancien doyen de l’Université de Bâle, auteur de Baudelaire, le soleil noir de la modernité(Gallimard, 1970) ; Album André Breton, Iconographie commentée (Gallimard, 2008) ; Un siècle de Goncourt, (Gallimard 2012).

Trois séances sont consacrées respectivement aux problèmes historiques, esthétiques et éthiques, domaines distingués pour la commodité de la discussion mais intrinsèquement liés.

Samedi 24 janvier 2015, 14h 30 : Questions d’histoire et de définition

  • Qu’est-ce que l’art moderne ? Delacroix, Manet et le « modern art » sont-ils modernes ? 
  • Qu’est-ce que l’art dit d’avant-garde ? 
  • Du romantisme au surréalisme : définitions et périodisations entre 1850 et 1930.
  • Picasso, créateur ou destructeur ?

Robert Kopp et Stéphane Guégan, historien et critique d’art, auteur de nombreux ouvrages et articles sur l’art et la littérature du XIXe et du XXe siècle, derniers ouvrages parus : Cent tableaux à éclipse (Hazan 2014), Picasso, ma vie en vingt tableaux ou presque (Beaux-arts édition 2014).

Samedi 14 février 2015, 14h 30 : Questions d’esthétique

  • Peut-on parler d’un « paradigme » de l’art contemporain ?
  • Quelle différence (ou opposition) entre moderne, post-moderne, contemporain ?
  • La place et le rôle de Marcel Duchamp. Les ready-made sont-ils contemporains ?

Nathalie Heinich, auteur de nombreux ouvrages, dont plusieurs sur l’art contemporain, derniers ouvrages parus : Guerre culturelle et art contemporain (Gallimard, 2010), Le paradigme de l’art contemporain. Structures d’une révolution artistique (Gallimard, 2014),
et Jean Clair, ancien directeur du musée Picasso, membre de l’Académie française, auteur de nombreux ouvrages sur l’art et la littérature, derniers ouvrages parus : Le Temps des avant-gardes. Chroniques d’art 1968-1978 (La Différence, 2012) ; Les Derniers Jours, (Gallimard, 2013). 

Samedi 7 mars 2015, 14h 30 : Questions d’éthique

  • L’approche éthique de l’art est-elle légitime ? 
  • De quelles valeurs l’art contemporain est-il porteur ? 
  • L’art doit-il véhiculer des valeurs ?

Anne Martin-Fugier, historienne et écrivain, a publié de nombreux ouvrages sur la vie culturelle et sociale au XIXe siècle, notamment de La vie d’artiste au XIXe siècle (Fayard, 2007), collectionneuse d’art contemporain, elle a également publié trois volumes d’entretiens avec des Galeristes, des Artistes et des Collectionneurs d’aujourd’hui (Actes Sud) 
Christine Sourgins, historienne de l’art, a publié Les mirages de l’Art contemporain (La Table ronde, 2013)
Alain Besançon, membre de l’institut, a écrit de nombreux ouvrages sur le totalitarisme et la culture russe, auteur de L’image interdite. Une histoire intellectuelle de l’iconoclasme (Fayard, 1994).